Extraits du livre : Yoga et Vie spirituelle
de Sri Chinmoy
- la plus ancienne religion du monde
- Hindouisme et Amour
- Dieu personnel et impersonnel
- la Religion éternelle
- l’hindouisme aujourd’hui
- la quintessence de l’hindouisme
- le passé et le présent de l’hindouisme
- l’hindouisme : son sens spirituel
L’hindouisme
« Connais-toi toi-même. » Voici ce que l’hindouisme défend. C’est la quintessence de l’hindouisme.
Dans un monde d’incertitudes agitées, dans un monde d’hypocrisie obscure et de déraison aveugle, la religion est une des rares choses capable de préserver sa dignité. C’est la religion qui fait venir la divinité de l’homme en avant. C’est la religion qui peut inspirer l’homme à lutter avec le présent impitoyable, à réaffirmer sa force intérieure et à combattre pour la Vérité et pour l’Heure de Dieu.
Vous savez tous que la religion hindoue est l’une des plus anciennes religions du monde. Contrairement à la plupart des religions du monde, la religion hindoue n’a pas de fondateur en particulier. À la base, elle est fondée par les paroles ferventes des rishis, des visionnaires. Un visionnaire est celui qui a la vision de la Vérité et qui communie avec la Vérité.
La définition de l’hindouisme
Si vous voulez définir l’hindouisme, vous pouvez le faire à l’aide d’un seul mot : Amour. Cet Amour embrasse tout et ne cesse de grandir. Un hindou fervent dira : « Je peux vivre sans air, mais pas sans Dieu. » Mais par ailleurs, un hindou qui dit qu’il ne croit pas du tout en Dieu est tout de même un hindou. Il se sent hindou, et personne ne le conteste. C’est le choix personnel qui prévaut. Un hindou peut adorer des centaines de dieux comme il peut n’en adorer qu’un seul. Pour lui, Dieu peut être personnel ou impersonnel. Mes jeunes amis, je vais essayer de vous expliquer ce qu’on entend par « personnel » et « impersonnel ». Prenez un avion dans un aéroport. Vous pouvez le voir, c’est quelque chose de concret, matériel et tangible. Lorsque l’avion quitte le sol et n’est plus visible dans le ciel, vous savez qu’il est tout de même quelque part dans le ciel. Il peut voler vers le Canada ou vers le Japon, mais vous savez qu’il existe quelque part, et qu’il fonctionne. De même, le Dieu « impersonnel », que nous ne voyons peut-être pas dans une forme tangible, nous Le percevons dans notre conscience éveillée, et nous ressentons qu’Il nous guide et nous transforme de manière invisible.
La réalisation de Dieu
Nous avons parlé des conceptions de Dieu dans l’hindouisme. Voyons maintenant ce qu’il est dit au sujet de la réalisation de Dieu. La réalisation de Dieu n’est autre qu’une science spirituelle qui met un terme à la souffrance, à l’ignorance et à la mort. Mais nous devons réaliser Dieu pour Son salut et non pour notre propre salut. Chercher Dieu pour notre propre salut, c’est nourrir en vain nos incessants désirs. Mais chercher Dieu pour Son salut, c’est vivre dans Sa Conscience universelle ; en d’autres termes, c’est être absolument et inséparablement uni à Lui.
L’immense question est de savoir si Dieu est toujours en nous, s’Il vient dans notre cœur pendant de longues périodes en tant qu’invité, ou bien s’Il ne fait que passer. Avec un profond sentiment de gratitude, j’évoquerai l’âme immortelle d’Emily Dickinson, dont l’inspiration spirituelle incite l’aspirant à savoir ce que Dieu l’Infini est précisément. Elle dit :
L’Infini, on le présume être un invité soudain,
Mais comment ce prodige peut-il venir,
Lui qui n’est jamais parti ?
On appelle l’hindouisme la Religion éternelle
Elle recherche l’union avec Dieu de toutes les manières possibles connues par l’humanité. Elle veut une union de l’homme avec Dieu pleinement comblante, ni plus, ni moins. Son essence est la tolérance. L’hindouisme refuse de considérer les religions du monde comme des entités séparées. Incluant en elle-même toutes les religions du monde à sa propre manière, on peut l’appeler sans être loin de la vérité, une Association de Croyances.
Pour un hindou authentique, l’amour pour les autres est une partie organique de son amour pour Dieu. C’est dans la joie et substantiellement que son âme proclamera et chantera avec l’esprit indomptable de Walt Whitman :
Je me célèbre, et me chante,
Et ce que j’assume, vous l’assumerez,
Car chacun de mes atomes
Vous appartient aussi bien.
La caractéristique la plus frappante de l’hindouisme est sa quête d’une expérience, ou plutôt d’une réalisation directe de Dieu.
Si vous étudiez les Vedas, les Upanishads, la Bhagavad Gita et d’autres Écritures indiennes, vous serez peut-être surpris de voir que bien qu’elles mettent chacune l’accent sur une vision particulière ou des idées particulières, elles incarnent toutes fondamentalement la même Connaissance divine parfaite, qui est Dieu.
Le trait saillant de la religion hindoue est exprimé de façon unique dans les enseignements de l’Isha Upanishad : « Vivez heureux dans la renonciation. » Vous savez parfaitement bien que le bon et le plaisant ne sont pas forcément les mêmes choses. Si vous voulez le plaisir, vous pouvez arriver au pied même du manguier, mais ses fruits vous seront refusés par le propriétaire de l’arbre. Mais si vous voulez le bien lui-même, qui est essentiellement la Vérité, la situation sera complètement différente. Si vous voulez la mangue, non pas pour satisfaire votre envie, mais pour étudier sérieusement le fruit, le propriétaire sera très satisfait de vous. Non seulement il vous offrira une mangue pour l’étudier, mais il vous en offrira à manger autant que vous voudrez.
Aucun d’entre nous ne veut être stupide ; nous devons alors aspirer au bon et nous écarter du plaisant une fois pour toutes. Notre But, la fontaine de la Vérité et de la Béatitude les plus élevées, n’est accessible qu’à l’amoureux de Vérité qui veut se réaliser dans le voyage constamment merveilleux de son âme pour s’élever et s’approfondir.
Un hindou dévoué aspire à un cœur parfaitement étranger à l’hypocrisie, un cœur aussi vaste que le monde. Peut-être pensez-vous qu’il est impossible d’avoir un tel cœur, que c’est un idéal inaccessible. Mais je ne suis pas de votre avis. De telles nobles âmes vivent à présent même sur cette terre. Votre formidable président, Abraham Lincoln, avait certainement un cœur de ce genre. Pour citer votre grand philosophe, Ralph Waldo Emerson : « Son cœur était aussi vaste que le monde, mais il n’y avait aucune place en lui pour retenir la mémoire d’une erreur. »
Mes frères et sœurs, je ne trouve aucune raison de ne pas voir en vous un cœur aussi vaste que le monde, vide d’hypocrisie et d’ignorance, et en même temps, un cœur inondé de la Vérité de l’Au-delà.
La foi et la dévotion
La foi est la force puissante de Dieu en l’homme.
La dévotion est la force puissante de l’homme en Dieu.
La dévotion emporte Dieu dans le cœur de l’homme.
L’hindouisme aujourd’hui
Je suis un rêveur. Je viens du pays des rêves. Je suis à présent sur un bateau de rêve. Le nom de mon bateau de rêve est Hindouisme. Il navigue jour après jour, traversant l’Océan de l’Éternité. Il ne connaît aucune fin de voyage. Son but est l’Immortalité. Le Batelier est le Rêveur Suprême. Mes frères et sœurs, si vous voulez vous embarquer avec moi sur ce bateau, venez. Je vous accueille tous les mains jointes, avec un amour sans bornes et des larmes de félicité. La traversée ne coûte pas un dollar, pas un centime, rien de la sorte. Le prix n’est que de la sympathie, la sympathie qui jaillit du fond du cœur.
Pour ajouter à la joie de notre enthousiasme, la voix d’un rêveur courageux, tout à fait inattendu, se fait entendre, et son écho se répète encore et encore dans les profondeurs de notre mémoire. Il y a un siècle et demi, ce rêveur vit le jour ici, à Long Island, dans l’état de New York. Son nom est Walt Whitman. Ce poète visionnaire nous accompagne dans notre voyage extraordinaire avec son message du « Je » universel.
Notre premier arrêt nous fait rencontrer le Dr Radhakrishnan, l’un des plus grands philosophes vivant actuellement. Il parle ainsi de l’hindouisme :
« L’attitude de l’hindou face à la religion est intéressante. Alors que des croyances intellectuelles déterminées démarquent une religion de l’autre, l’hindouisme ne se donne aucune limite de ce genre. L’intellect est subordonné à l’intuition, le dogme à l’expérience, l’expression extérieure à la réalisation intérieure. »
L’hindouisme est une religion simple
Gardant cela à l’esprit, examinons plus loin l’hindouisme. C’est sans nul doute une grande religion. Mais c’est également une religion simple qui ne veut pas créer de confusion en l’homme ni mettre à l’épreuve ses capacités intellectuelles. Il ne sollicite pas son attention ni sa faveur. Ce qui compte le plus dans l’hindouisme, c’est la recherche de la compréhension de son âme. L’hindouisme veut, non seulement préserver l’harmonie de chaque âme humaine, mais également la propager, si telle est la Volonté de Dieu. Ce qu’il veut, c’est posséder et être possédé par tout ce qu’il y a de mieux dans la sagesse culturelle, religieuse et spirituelle du monde.
L’hindouisme n’est pas une religion statique
Bien que connaissant des périodes d’inertie, l’hindouisme n’est pas une religion statique. Une religion statique ne conduirait qu’à la stérilité et finalement à la mort. Au cours de sa longue histoire, l’hindouisme est devenu l’emblème de la souplesse, de l’indépendance, de la pensée créatrice, et de l’innovation spontanée dans la pensée comme dans l’action. L’hindouisme sait absorber ; il sait également comment rejeter pour s’asseoir aux pieds de la Vérité. L’hindouisme est une imploration pour la Vérité qui ne cesse de s’élever. Il aspire à être l’essence d’une panacée spirituelle qui embrasse tout pour nourrir l’humanité.
Le passé de l’Inde est remarquablement riche et varié. On peut dire la même chose de son présent intrépide qui peut fournir un point de départ pour le futur doré et qui le fournira. L’hindouisme d’aujourd’hui s’efforce sincèrement de découvrir un mode de vie unique dans lequel tous les groupes d’appartenances radicalement différentes, qu’elles soient raciales, historiques, éthiques, conceptuelles et spirituelles, puissent vivre en parfaite harmonie et en même temps collaborer activement à la réalisation d’une tâche : le mariage de la Matière et de l’Esprit. L’Inde, dans son essence la plus pure, n’est ni un pays assoiffé de matière ni un pays fuyant le monde. Et la tolérance, avec laquelle l’hindouisme a toujours été associé, est solidement enracinée dans le sacrifice et dans la pleine reconnaissance des droits des autres hommes.
L’Inde agit sans peur ni sentiment de supériorité.
En fait, l’hindouisme a récemment commencé à se remettre en question, et ses progrès avancent rapidement. Il est vrai que l’hindouisme d’aujourd’hui est confronté à de nombreux problèmes. Il est également vrai que Mère Inde doit, seule, résoudre tous ses problèmes, et elle le fera. Bharat Mata, (Mère Inde), est animée d’une volonté invincible. Le progrès, tant matériel que spirituel, avance de manière fulgurante. Cependant, le fait d’une importance suprême est que l’hindouisme d’aujourd’hui se remodèle, non pas sur des systèmes occidentaux ou orientaux, voire nordiques ou méridionaux, mais sur le Modèle propre de l’Infini.
Ici, en Amérique, nous sommes dans un pays de liberté, d’une liberté qui nourrit les pensées dynamiques et les mouvements dynamiques. En Inde, nous sommes dans un pays de liberté, d’une liberté de spiritualité fertile et tolérante qui nourrit toutes les religions.
Ici, nous voulons atteindre Dieu en courant à toute vitesse, et là-bas, nous voulons atteindre Dieu en grimpant rapidement.
Écoutons un dévot hindou : il dit que son père est le Silence, et sa mère la Puissance. Le silence nourrit sa conscience, la puissance utilise sa conscience. Ses parents lui apprennent à respirer l’air de l’unité spirituelle, à ressentir cette unité dans tous les êtres humains, et en fait, dans la création tout entière. Ses parents lui ont appris le secret des secrets : le monde ne peut être vu et ressenti pleinement et intégralement qu’à travers la méditation. Ils lui ont fait comprendre que sa vie faisait partie intégrante de l’humanité. Il n’avait ni race, ni nation propre. Sa religion est la vision de Dieu. Il sait que pour réaliser Dieu, il n’a pas besoin de tuer son soi inférieur. Il lui suffit de le transformer en son Soi supérieur. Et voyez ! Le But l’appelle. C’est en fait une nouvelle approche de la Vérité et une nouvelle réalisation de la Vérité. Et enfin, il ne veut pas seulement voir Dieu, mais devenir Dieu Lui-même.
Ainsi vogue notre bateau, dansant en harmonie au rythme éternel et mystique de Dieu. Nous sommes des rêveurs, et nous sommes également des réalistes et des idéalistes. Notre bateau, avec tout l’amour de son cœur, se languit de toucher les rivages lointains de l’Au-delà doré. Notre bateau, avec toute la paix de son âme, aspire à communier avec le Souffle du Suprême.
La quintessence de l’hindouisme
Permettez-moi tout d’abord de vous raconter une petite histoire.
Un grand sage de l’Inde ancienne, du nom de Bhrigu, voulut tester les trois dieux principaux de la grande Trinité hindoue : Brahma, Vishnu et Shiva. Il voulait déterminer qui était le plus grand. Il s’approcha de Brahma, sans lui montrer le moindre respect. Brahma était très mécontent de lui. Avec le même manque de respect, Bhrigu alla voir Shiva, qui entra dans une colère violente. Lorsqu’il s’approcha de Vishnu, il le trouva profondément endormi. Alors il posa son pied sur la poitrine de Vishnu pour le réveiller. Le dieu sursauta d’avoir été réveillé de manière aussi cavalière, et aussitôt, il se mit à masser le pied de Bhrigu avec affection en lui demandant : « Tu t’es fait mal au pied ? Je suis désolé. » C’est ainsi que Bhrigu découvrit que Vishnu était le plus grand des trois dieux.
La tolérance témoignée par le dieu dans cette histoire n’était pas le fait d’une faiblesse, mais de la générosité du cœur. De plus, elle venait d’un sentiment d’unité. Lorsque, dans notre sommeil, notre coude heurte une partie de notre corps, nous ne nous fâchons pas avec le coude, mais nous le massons. De même, l’hindouisme s’applique à voir l’humanité comme un seul grand corps.
L’hindouisme est un fleuve qui coule avec vivacité et sans répit ; l’hindouisme est un arbre qui grandit consciemment et divinement. L’hindouisme est diversité. L’hindouisme est unique dans son aspect maternel, béni par des enfants qui chérissent des conceptions diverses de Dieu. L’un de ses enfants dit : « Mère, il n’y a pas de Dieu personnel. » Elle répond : « Je vois, mon enfant. » Un second enfant dit : « Mère, s’il y a un Dieu, Il ne peut être que personnel. » « Je vois, mon enfant. » Répond-elle à nouveau. Et le troisième enfant dit : « Mère, Dieu est à la fois personnel et impersonnel. » Elle lui répond : « C’est bien, mon enfant. » Et maintenant, elle leur dit : « Soyez heureux, mes enfants, soyez heureux. Gardez vos propres croyances et apprenez à travers elles. Grandissez à travers elles et soyez toujours fidèles à vos idéaux. » C’est vraiment là le cœur maternel de l’hindouisme.
L’hindouisme s’accroche à la loi intérieure de la vie qui est l’héritage commun de l’humanité. Tant qu’une personne est un chercheur de Vérité, qu’il soit croyant, athée ou agnostique n’a pas d’importance. Chaque âme humaine a sa place dans l’idéal hindou de la spiritualité. Ces mots de Gandhi sont importants : « L’hindouisme est une poursuite incessante de la Vérité. C’est la religion de la Vérité. La Vérité est Dieu. Nous avons connu le déni de Dieu. Nous n’avons pas connu le déni de la Vérité. »
Le passé de l’hindouisme
Il est absurde de penser que l’Inde du passé n’a joué qu’un rôle de renonciation au monde. Nos anciens ont accepté la vie de toute leur foi. Ils croyaient clairement en la vie comme une grande force.
Nos parents védiques ont exprimé leur volonté de vivre une longue vie rayonnante lorsqu’ils chantaient :
Tach chaks ur debahitam…
Puissions-nous voir cet Œil brillant, ordonné par Dieu,
Se lever devant nous pendant cent automnes.
Puissions-nous vivre cent automnes.
Puissions-nous entendre pendant cent automnes.
Puissions-nous bien parler pendant cent automnes.
Puissions-nous tenir nos têtes droites pendant cent automnes.
Oui, au-delà même de cent automnes.
En toute honnêteté, ils (nos ancêtres védiques) ont essayé d’appréhender et de comprendre le mystère de la vie. Ils ont accepté la terre avec ses joies et ses chagrins, ses espoirs et ses frustrations. De plus, ils voulaient vivre comme les maîtres et seigneurs de la vie. C’est pourquoi ils étaient implacables et irréductibles dans leur opposition au mal. Ils voulaient que leurs âmes soient complètement possédées par le Suprême, et en même temps, ils aspiraient à Le servir dans le monde.
Nos prédécesseurs védiques ont découvert l’existence de deux vies : la vie ordinaire et la vie supérieure. Ils ont donné leur importance aux activités physiques, vitales et mentales, mais dans la perspective d’entrer dans une vie spirituelle plus élevée, une vie de connaissance, de lumière et de vérité plus élevées. Une fois cette vie supérieure établie, ils savaient que l’âme recevrait un soutien total des membres de sa famille, le corps, le vital, le mental et le cœur pour la manifester et l’exprimer entièrement. Ainsi l’idéal d’une connaissance particulière conduisant à la libération de l’âme humaine aspirante est-il devenu incontournable. Nos ancêtres étaient des réalistes qui ont ressenti que la joie spontanée de la vie nourrirait le corps et renforcerait l’âme. Ils savaient que le secret de l’évolution était la liberté. Ils ont proclamé :
Uru nastanve tan….
Donne la liberté à nos corps,
Donne la liberté à notre demeure,
Donne la liberté à notre vie.
Telle était la liberté qui aidait à défaire le nœud de l’ignorance. Ils étaient positifs dans leur acceptation de la vie ; positifs également dans leur aspiration à l’Immortalité.
Le présent de l’hindouisme
Il est facile d’insister sur le fait que l’Inde du passé était sublime, alors que l’Inde d’aujourd’hui est tout sauf cela. Mais ceux qui pensent que l’hindouisme est la seule partie de la vie indienne qui mérite d’être étudiée se trompent. Le présent de l’Inde a également beaucoup à offrir au monde entier. La lumière de son âme, indifférente à toute reconnaissance extérieure, joue un rôle important dans l’éveil du cœur du monde et est ultimement destinée à inspirer l’humanité par le message de la vérité, du pardon et de la bonté universelle.
L’hindouisme est une aspiration dynamique divinement surchargée. Tout au long de son voyage éternel, le don de soi a toujours été le souffle même de sa vie.
L’hindouisme est complexe mais il a toujours gardé et gardera toujours une note distincte : celle de la spiritualité. Un véritable hindou nourrira toujours la flamme de ses idéaux, quels que soient les changements éphémères dévastateurs, quelle que soit la puissance des forces destructrices. Le Dr Radhakrishnan, le roi des philosophes, a largement éclairé ce sujet :
« Lorsqu’une ancienne culture contraignante est brisée, lorsque des normes éthiques se dissolvent, lorsque nous sommes tirés hors de notre indifférence ou réveillés de notre inconscience, lorsqu’il y a dans l’air un ferment général de crise culturelle qui bouleverse intérieurement, une forte marée d’agitation spirituelle balaye les gens et l’on peut voir se profiler à l’horizon quelque chose de nouveau, sans précédent, le commencement d’une renaissance spirituelle. »
Le monde d’aujourd’hui aspire consciemment à l’unité. L’hindouisme enseigne que l’unité de l’Inde est son unité pour la vision spirituelle, sa pleine réalisation. L’humanité est petit à petit convaincue de la vérité que les vies matérielle, intellectuelle et spirituelle peuvent vraiment courir à perdre haleine pour accomplir la victoire finale de Dieu sur terre.
L’hindouisme : son sens spirituel
L’idéal de l’hindouisme consiste à tout voir dans le Soi et à voir le Soi dans tout. Un hindou croit que chaque individu est une manifestation consciente de Dieu. L’esprit du service désintéressé est son secret suprême. Un hindou ressent toujours que c’est Dieu qui Se manifeste et Se parfait à travers chaque être humain. Chaque âme individuelle représente une forme de divinité projetée par le Suprême. Chaque être humain a une mission à remplir sur terre, et il le fait à l’heure choisie de Dieu.
Le souffle de l’hindouisme est la spiritualité. Tout ce qu’un hindou fait, il le fait comme un moyen d’atteindre cette finalité. Il est vrai qu’il veut accomplir tout ce qu’il peut ici sur terre, comme n’importe qui d’autre, d’ailleurs. Mais ce qui est important, c’est qu’il ne fait rien et ne peut rien faire aux dépens de sa vie spirituelle. Pour lui, la vie spirituelle est la seule vie qui peut un jour le couronner de la victoire de la Perfection parfaite.
On entend très souvent le mot « péché » dans la vie spirituelle. Là, je dois dire qu’un hindou n’a rien à voir avec le péché. Il ne tient compte que de deux choses : l’Ignorance et la Lumière. Avec la lumière de son âme, il veut nager à travers l’océan de l’ignorance et transformer son soi inférieur en son Soi supérieur.
Tena tyaktena bhunjita. « Vivez pleinement en renonçant. » Tel est le message plein de vie des visionnaires hindous. Ce qui doit faire l’objet de notre renonciation, c’est le cortège de nos désirs, ni plus, ni moins. En renonçant à tous nos désirs terrestres, nous pouvons goûter à la véritable réalisation divine.
Je vous ai déjà dit que le souffle de l’hindouisme était la spiritualité. Dans la vie spirituelle, le contrôle des sens joue un rôle important. Cela dit, essayons de comprendre clairement la fonction des sens. Un dévot hindou pense que ses sens ne sont pas faits pour être mortifiés. Les sens sont ses instruments, et leur assistance est indispensable. Les sens doivent fonctionner dans toute leur vigueur, pour être au service divin d’une intégrité totale qui comble toute chose. Ce n’est qu’à cette condition que la véritable divinité peut poindre dans la vie humaine. L’auto-indulgence conduit à la plus grande frustration. Pauvre humanité ! Elle utilise si fastueusement les plaisirs du corps, et les épuise. L’homme n’est certainement pas aussi généreux dans sa vie avec quoi que ce soit d’autre que son auto-indulgence. Hélas, à sa grande surprise, avant même d’épuiser les plaisirs de son corps, sa vie même s’épuise dans un néant futile. Il est grand temps pour le grossier en l’homme de faire place au divin en lui. La brutalité ne conquiert pas, elle tue.
La spiritualité est l’amour qui embrasse tout. Cet amour conquiert l’homme et le rend conscient de sa véritable divinité intérieure, afin qu’il puisse se réaliser et devenir un canal parfait pour la manifestation de Dieu. Cet amour, ou ce lien d’amour, l’homme peut le créer en lui pour se lier ou s’unir à d’autres individus, à d’autres personnes de son pays et du monde entier. C’est cela qu’un hindou ressent.
Sans mouvement, pas de progrès. Le mouvement a besoin d’être guidé. Cette guidance est la connaissance. Mais l’homme doit savoir que la connaissance mentale ne peut l’aider que dans une certaine mesure. Avec son aide, il ne peut s’approcher du But. C’est la connaissance de l’âme qui accorde à l’homme la réalisation de Dieu.
Robert Browning dit :
« Tout libres que nous nous sentons,
Nous n’en sommes pas moins rapidement enchaînés. »
L’homme est attaché au fini, mais il ne peut être attaché par le fini. L’homme s’est soumis au temps et à l’espace. Mais ni le temps, ni l’espace ne l’ont obligé à se soumettre. L’homme essaye de posséder la beauté du fini. Il pense qu’il peut s’attacher au fini, qu’il sera capable de posséder sa beauté. Hélas, au lieu de posséder, il est possédé. Le temps et l’espace l’ont attiré. Il pensait pouvoir les posséder avec sa soumission. Ils ont accepté avec plaisir sa soumission. Mais il s’est retrouvé possédé par eux de manière impitoyable. La possession n’est pas l’unité ; la conquête n’est pas l’unité.
La vision de l’hindouisme est l’unité dans la diversité. L’hindouisme embrasse d’abord tous les éléments étrangers, puis il essaye de les assimiler, et enfin, il essaye de s’agrandir dans un tout, dans le but de servir l’humanité et la nature. C’est là le signe de son aspiration dynamique riche de sens.